D’abord, à quel moment on devient “écolo” au juste ? Quand on fait son premier pas “tiens, je vais tester le vrac chez Carrefour” ? Quand on est devenu à 74,3% zéro-déchet ? ou quand on a renoncé à tout jamais à prendre l’avion, fier sur notre vélo made in France, avec nos vêtements éco-responsables en route vers le marché bio et local ?
Je ne crois pas qu’il existe un niveau ultime du green game où on arrive à stopper le dérèglement climatique et convaincre toute l’humanité au passage, Trump compris. Pour moi, y’a pas vraiment de fin en soit à ce cheminement, qui, comme son nom l’indique est un chemin et non une destination précise.
Tout ça me fait penser à l’intérêt ou au danger de cette étiquette “écolo” d’ailleurs, mais on y reviendra à un autre moment…
La route sinueuse du changement
Etre écolo et vouloir agir commence avant tout par une prise de conscience qui ne se commande pas, même si une fois qu’on a eu la notre on aimerait troooop que notre frère arrête aussi d’acheter des carottes râpées industrielles en barquettes et que notre pote abandonne les pailles en plastoc dans ses Gin Tonic. Chacun sa route, chacun son timing.
Ensuite, il y a le premier pas. Qui arrive souvent après qu’on ait été touché par un reportage ou un livre choc. Semi-traumatisé par l’ampleur du désastre, on peut se retrouver en pleine montée de “han mais j’ai fait de la merde depuis des années en fait, je pensais à quoi enfin, viiiite faut que je change tout”.
S’en suit un long fleuve pas très tranquille fait de phases d’euphories des déclics, de périodes zen et encourageantes des petits pas quotidiens mais aussi de moments de doutes : “Pourquoi je me fait chier à limiter mes déchets à la source et à trier attentivement ce qu’il reste quand je découvre que mon voisin Michel s’en contre-balance et mélange joyeusement bouteille en verre, carton et plastique de pizza, parce que “de toute façon ils mélangent tout à la fin” ? Ou de culpabilisation : “Pfff, je n’arrive pas encore à avoir la vie parfaite de Madame Zéro déchet d’instagram…”
On peut alors se sentir pèle-mêle : impuissant face aux enjeux de taille, remettre en question l’impact de sa démarche ou avoir le sentiment de n’en faire jamais “assez”.
Dans cette période et tout a long de la route, je pense donc qu’il est fondamental de se serrer les coudes dans nos petits gestes entre apprentis Gandhi, bien décidés à être le changement qu’on veut voir dans le monde (et chez Michel). Or je vois encore trop régulièrement des messages militants culpabilisants, des personnes qui pointent le moindre “faux-pas” d’un proche ou des commentaires ultra-critiques face à une petite incohérence d’un autre sur le web. La dictature du perfectionnisme. Tout ça ne fait pas avancer la cause et participe en plus à véhiculer qu’être écolo, c’est être sectaire / extrémiste / intolérant / relou (ou tout ça en même temps), ce qui ne donne à personne envie de s’y mettre…
Le changement intérieur, l’espoir pour un changement collectif ?
Avant d’aller sermonner les autres, il serait donc utile de se lâcher un peu la grappe, de regarder ses propres incohérences et limites avec bienveillance, car elles sont HUMAINES, (rappelons-le, personne n’est un super-héro !), et d’accepter qu’on ne peut pas être irréprochable à tous les niveaux.
On a tous des histoires, convictions et des contraintes différentes, avançons avec tolérance, foutons-nous la paix avec cette escalade permanente vers le toujours plus, toujours mieux et apprenons à célébrer nos petites actions, même imparfaites !
Stop les gué-guerres entre flexitarien/vegan/bio/locavores et autres affrontements stériles issus du même bord, la seule voix qui compte pour commencer c’est celle où on se sent bien, où on prend du plaisir sans culpabiliser, où on avance doucement mais surement, en attirant même au passage quelques curieux.
Utilisons notre énergie pour trouver ensemble des solutions positives, constructives et bienveillantes plutôt que se juger les uns et autres, tout le monde s’en porterait mieux, planète comprise !
Je tire mon coup de gueule ici en étant bien consciente que je ne suis pas exempte de ces critiques ! En tant qu’humaine imparfaite, j’ai moi aussi parfois endossé le rôle de la relou jugeante, j’en tirais d’ailleurs les leçons ici. Ce message est donc également pour moi un rappel de cette ligne plus sereine vers laquelle je veux tendre 😉
Tristan Lecomte dit à ce propos dans un article fort intéressant : “Une critique vindicative n’est que l’expression de ses propres contradictions, de ses peurs et de son sentiment d’impuissance. Le Monde n’est injuste que parce que nous sommes tous, individuellement et collectivement, injustes. On s’offusque de la pauvreté qui n’est pourtant que l’évidente expression de notre égoïsme à tous. Entrer dans le débat du plus ou moins juste, en dénonçant comme responsable tel acteur économique ou organisation n’a pas de sens, sinon de pointer nos propres incohérences et nous y enfoncer tous au lieu de tenter de nous élever ensemble”
Élevons-nous, élevons le débat !
On ne va pas changer la société, les hommes et le monde en se battant CONTRE, mais en proposant et en créant POUR l’arrivée d’un nouveau modèle.
“Ne t’attaque pas au Système, démode-le !” disait Bernard Werber, “Au lieu de faire la révolution des autres, fais ta (r)évolution personnelle. Plutôt que de vouloir que les autres soient parfaits, évolue toi-même. Cherche, explore, invente. Les inventeurs, voilà les vrais rebelles !”
Alors, on invente quoi de beau tous ensemble ?
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